COMME DES SUSHIS DANS L'EAU

Luxe, calme et volupté. Une hôtesse de train courbée en deux pour vous souhaiter la bienvenue; un bataillon de femmes de ménage en uniforme qui en dix minutes fait briller chaque wagon comme un sou neuf en changeant même les appuie-tête; un train grande vitesse ponctuel à la minute près : après nos expériences chinoise et vietnamienne, l'arrivée au Japon est un choc bien agréable. Le premier jour est une suite d'émerveillements : pas un son de klaxon dans les rues (une mesure du niveau de civilisation ?), des bateaux qui filent sur l'eau à 80 km/h propulsés par un moteur de Boeing et sans bruit ni secousse pour ses occupants, des villes quadrillées de voies en relief et de passages piétons sonores pour les non-voyants. Ici on se préoccupe de votre confort jusqu'à la lunette des WC : un bouton vous chauffe le postérieur, un autre vous envoie un jet d'eau... avant ou arrière. A table, pour éviter de salir vos doigts délicats, rien de tel qu'une pince presse-citron. Et lors du shopping (les Japonaises en sont friandes), fini les parapluies qui dégoulinent : à l'entrée, tout le monde emballe son pépin dans une pochette plastique. Enfin, après une dure journée de randonnée, dans n'importe quel coin du Japon, vous vous détendez avec délice dans un Onsen, un immense bain d'eau chaude.

Le Japon, ce n'est pas que du béton. Vu de France, le Japon se limite à Tokyo-Osaka-Kyoto. Sur place, la réalité est bien différente. Le territoire nippon est couvert de montagnes à 75%. Nous nous en rendons compte dès les premiers jours en accostant sur l'île de Yakushima. Nous avons rarement vu une végétation aussi luxuriante. Et pour cause : il tombe ici 10 m d'eau par an. Nous aurons de la chance, deux grands jours de soleil et pas une goutte de pluie. La ballade nous emmène au milieu de gigantesques cèdres centenaires, dans une forêt primitive où l'homme semble néanmoins le bienvenu.

Époustouflante nature qui n'a pas fini de nous surprendre... A Ebino Kogen, notre route croise celle de nombreux Japonais venus profiter de leur week-end pour faire l'ascension des volcans.

Mais le Japon c'est aussi un archipel, avec ses villages de pêcheurs traditionnels comme le pittoresque hameau d'Ine dans la péninsule de Tango. Un petit coin de paradis que nous atteignons après 20 km à bicyclette. Nous y prendrons un repos mérité au bord de l'eau, accompagnés de notre succulent "bento" (plat pique-nique dont les Japonais raffolent) dans un cadre paisible et un paysage de carte postale. L'un de nos meilleurs souvenirs du Japon.

Délires urbains. Après une semaine passée dans la nature, le contraste est d'autant plus fort lorsque nous arrivons en ville, où se côtoient portable-maniaques dans le métro, librairies géantes de mangas, game centers et salles de machines à sous (Patchinko) au vacarme assourdissant.

A Osaka, la jeunesse branchée se donne rendez-vous dans le quartier de la gare, au pied de façades couvertes de néons et d'écrans géants. Les marques rivalisent de kitsch et ne savent plus quoi inventer pour se distinguer.

A Tokyo, mieux vaut ne pas être agoraphobe dans les ruelles où les adolescentes font leurs courses le week-end. Deux découvertes cocasses : un sous-sol entier réservé aux filles, où les bandes de copines se tirent le portrait pendant des heures et cette boutique de layette... pour chiens. Et puis pour les urbains stressés, rien de tel qu'une partie de pêche au milieu des buildings.

Vrai/Faux, les idées reçues.
C'est compliqué pour un étranger de voyager au Japon : FAUX. C'est au contraire même plutôt simple en comparaison d'autres destinations car très bien organisé (comme tout au Japon). Le réseau ferre est dense, ponctuel et régulier avec un double affichage systématique japonais-anglais. Enfin, dans toutes les gares un bureau d'information procure des renseignements sur les logements ou sites touristiques aux alentours.
Le Japonais est timide : FAUX. Il est réservé, par respect pour les autres, ce qui ne l'empêche pas d'être curieux et ouvert. Beaucoup, y compris parmi les plus anciens, nous ont abordés spontanément même lorsqu'ils ne parlaient pas anglais.
Le Japonais est poli : VRAI. Et à un niveau inimaginable pour nous autres barbares. Exemple : un couple nous a échangé toute sa monnaie pour que l'on puisse payer nos tickets de bus et il n'en avait plus pour payer les siens. Autre exemple : ce pâtissier qui a interrompu son travail pour nous emmener en voiture acheter du pain au supermarché voisin.
Le Japonais aime la France : VRAI. Cela relève même du registre de la fascination. Pour preuve, les innombrables boutiques qui portent des noms français totalement incongrus.

Autre signe : le nombre de sacs Vuitton au km carré. Il parait que cette fascination se transforme souvent en dépression lorsque les intéressés débarquent chez nous. A bon entendeur...
Le Japon est cher : VRAI et FAUX. Le logement est hors de prix (100 euros la première nuit, la chambre la moins chère dans un lieu touristique). Mais on mange très bien pour moins de 10 euros.
Le Japonais a du mal à donner un avis : VRAI. Emmanuel a eu le malheur de demander une fois à un jeune de l'auberge de jeunesse sa préférence entre deux lieux de visite. Il nous a réclamé une minute de réflexion et est revenu une heure plus tard. Pour éviter un choix cornélien, il nous avait concocté un circuit sur mesure passant par les deux lieux en question avec horaires des bus, restaurant le midi et instructions en japonais.

Mémorable rencontre. Lors d'une randonnée, nous faisons la connaissance d'un officier et du capitaine du Kaiwo Maru (le Neptune), un voilier-école de 135 m, aperçu la veille dans le port de Kagoshima. Laurence avait vainement sondé l'officier sur une éventuelle visite du quatre-mâts. A notre grande surprise, le capitaine nous demande avant de se séparer à quelle heure nous souhaiterions monter à bord ! Emmanuel se sent obligé de se raser pour l'occasion, Laurence change de haut et met ses plus jolis bracelets, et nous voilà au pied de la passerelle, devant des badauds médusés, à brandir notre sésame : la carte de visite du capitaine. Nous aurons droit à une visite privée du navire illuminé. Nous apprendrons notamment que le pont est briqué tous les matins à l'aide de noix de coco collectées précieusement par les immigrés japonais d'Hawaï. Les chambres exiguës des cadets contrastent avec le grand salon dans lequel nous reçoit le capitaine autour d'une tasse de thé et de biscuits. Le monde est petit : au fil de la conversation, Laurence découvre que le Kaiwo Maru a croisé le bateau de son cousin Laurent à Honolulu...

Merci les amis ! Un grand merci à Kate et Stéphane ainsi qu'à Marie et Julien qui nous ont prêté leurs appartements à Osaka et Tokyo. Quelques jours de luxe ô combien appréciés après deux mois passés a barouder. Merci à Lucile (la soeur de Julien) et Jérome pour ce qui nous attendait dans le frigo à Tokyo... Foie gras et Sauternes. Nous n'aurions jamais osé en rêver... Merci à Alfred qui ne nous connaissait pas la veille et avec lequel nous avons passé une soirée arrosée dans les bars tokyoites, à refaire le monde. Merci à Clémence, Michel et Alexander pour leurs bons plans sur le Japon. Et merci à Manou et Marie-Ange pour les bons moments passés ensemble à Koyasan et Osaka (et merci pour le colis ramené à Paris).

Nous quittons le Japon comme nous l'avons découvert vu du ciel : avec le mont Fuji enneigé, après trois semaines totalement dépaysantes, dans un pays où les occasions d'être surpris se trouvent à chaque coin de rue mais où le voyageur n'est pas pour autant perdu.

Comments

[Matthieu]

Je suis sûr qu'en tant que conquérants de massif vous vous bien tatés pour le Mont FUJI non? Trop de neige sûrement...

[marie-hélène]

bonjour vous deux !! quel plaisir de vous lire !! en toux cas sans connaître le Japon, je coprends mieux mon attrait !! et vous ne l'avez pas calmé! j'ai h^^ate de découvrir ce pays et vous me donnerez des tas de "trucs" j'en suis sûre !! Le printemps s'instalmle à Paris, journée de grève aujourd'hui, morosité toujours !! profitez de ce merveilleux voyage !! je suis tellement heureuse pour vous deux !!
plein de baisers Marie-hélène